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Le Docteur Petiot est de retour en ville [PV Herbert]
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Mar 20 Nov - 1:55
Dimanche. L’église est bien remplie, ça fait plaisir à voir. Il y a pourtant pas une population catholique gigantesque à Cleveland, mais les américains prennent très au sérieux la religion, même s’ils le font avec leur habituelle naïveté bigote et innocente. Pour une fois, je suis présent dans l’édifice. Il faut pas oublier que je suis diacre et que c’est censé être ma priorité et ma vocation, même si des fois on en doute vu comment j’occupe mes semaines à traquer des monstres au milieu de rues sales, de prostituées et de vauriens en tout genre. Je veux dire, normalement un bon prêtre est censé se trouver au milieu des prostituées et des vauriens, comme le Messie le faisait, mais il le fait en tenue de prêtre et en prêchant, pas en commandant des verres et en traquant le Mal avec un fusil à pompe calibre 12 et des cartouches « Haleine de Dragon » dans son manteau.
« Et il leur dit: Maintenant, au contraire, que celui qui a une bourse la prenne et que celui qui a un sac le prenne également, que celui qui n'a point d'épée vende son vêtement et achète une épée. »

Sinon ça a été une messe plutôt standard mais néanmoins sympathique. Le prêtre Manuel José Benez, immigré mexicain (Comme pas mal de cathos) a fait tout un tas de sermon sur l’amour, sur le pardon tout ça, entrecoupés de chants religieux. Malheureusement, comme ici c’est rempli de latinos et de descendants européens, nous n’avons pas eu le droit à du gospel joyeux (« I get joy when I think about it ! (What he’s done for meeee!) ») mais du bon vieux chant grégorien en grec fait par des enfants (« KyyyyYYYyyyrie eleisoooon. »). Pour une fois, je me suis fait tout beau et présentable. Je me suis rasé la barbe de très très près, j’ai pris une douche avec de l’antipoux dans mes cheveux que j’ai raccourci aux ciseaux, et je me suis revêtu de mon gros vêtement pourpre avec le col romain traditionnel. Je me tiens aux côtés du prêtre Manuel, avec d’autres diacres, et manipule doctement et humblement tous les éléments de l’eucharistie : Le pain sans levain qu’il présente devant les fidèles, puis la même chose avec une petite coupe de vin blanc un peu aigre. Et subitement, comme par magie, le pain devient le corps du Christ, et la vin devient le sang du Christ. Il est maintenant temps de faire comme les garous et les vampires que j’aie pourtant l’habitude de traquer jusque dans les égouts et jusque dans les caves de réserves forestières, dans des caves à partouzes et dans des soirées huppées au sommet d’une penthouse : Je vais permettre à des gens de boire le sang et de manger le corps de notre prophète.

Je me poste à un coin de l’église pendant que les gamins chantent, leur voix vibrante à travers la petite nef de l’église. Faut pas non plus croire qu’on est dans une magnifique paroisse en pierre comme en Europe : C’est un bâtiment trop moderne pour mon goût, sans véritable âme, mais bon ça convient aux beaufs locaux qui vivent dans leurs lotissements. Tout bête avec ma coupe rempli de petits pains sans levain cassés en plein de petits morceaux, je reste tout droit tandis que un par un le fidèle s’approche. Je lui tends l’hostie et là les gens propres me tendent leur main, tandis que les sagouins se contentent d’ouvrir leur bouche, m’obligeant à la mettre sur leur langue directement. Sans mâcher (On mord pas le Christ!) ils retournent alors sagement à leur place. Avant cela, on a bien fait attention de faire circuler la corbeille pour récupérer le fric de la quête ; Mes munitions Haleine de Dragon ne vont pas se payer toutes seules, hop hop hop, on se cotise les chrétiens.

J’étais occupé à distraitement filer les hosties à tout le monde quand je vois une adolescente s’arrêter juste devant moi. Une métis latino-noire aux cheveux bouclés et qui est si petite qu’elle m’arrive au torse, alors que je suis déjà pas bien grand. En la regardant, je ne peux pas m’empêcher de soupirer de façon très sonore, oubliant momentanément que je suis dans une église.

« Oh, Eiza, qu’est-ce que tu fais là ?
– Mon frère ! Je dois vous montrer quelque chose !
– Pas maintenant Eiza, des gens attendent derrière toi.
– Je peux vous voir tout de suite après la messe ?!
– Oui oui. Allez, ouvre la bouche, accepte le corps du Seigneur. »

Elle tire la langue innocemment et je lui file le corps de Jésus sur son palais. Elle m’énerve trop. C’est une grosse idiote, à chaque fois qu’elle a un truc à me montrer c’est une connerie digne de panique bigote digne de Martine, 50 piges qui croit que les pédés ils vont infecter son fils. Non pas que les homosexuels ne soient pas dévoyés, mais je veux dire les américains ont un rapport à la sexualité qui est très particulier. Je sais, je suis américain aussi, mais je veux dire j’ai passé plusieurs années en Europe, c’est pas la même chanson. Eiza c’est le genre de folle qui porte une bague de chasteté au doigt. Partout où elle va son père la suit, ils ont une de ces relations malsaines très cheloues comme seul le Pays de la Liberté sait le faire, exactement comme on a l’exact inverse sur l’échelle de la folie, mais je vais pas entrer dans des débats sur la transsexualité avec vous.
Le padré Benez se prépare à faire l’envoi de la messe après de longues, longues minute à servir tout le monde pour qu’ils soient bien repus. Je m’impatiente. Comme un bon diacre, je reste à ses côtés, alors qu’il dit à tous nos fidèles d’aller en paix et de propager la parole de Dieu. Oui ou parfait. À peine terminé que je commence à m’éloigner, quand ce vieux mexicain m’arrête.

« Frère Françoÿs, m’interpelle-t-il avec sa manière horrible de prononcer mon prénom (Je ne lui en veux pas, mon prénom est imprononçable par 95 % de la population américaine).
– Oui mon père ?
– Je devais vous parler… C’est très important.
On vous voit de moins en moins à la paroisse. Pourrais-je savoir les raisons de votre absence lors des deux semaines dernières passées ? »

J’ai eu beaucoup de boulot. En fait c’était une fausse alerte complète, mais deux rednecks chtarbés soupçonnaient un type d’être un vampire. Il n’en était rien mais il y avait des signes qui semblaient ne pas trop tromper. Ça arrive des traques infructueuses. Y a trois ans je me souviens que j’ai passé trois mois dans une enquête avec filatures et recherche de preuves, au final c’était pas du tout un Vampire mais un tueur en série qui violait des vagabondes et des femmes ivres. Bon j’ai quand même filé tout le dossier constitué à la police de Seattle mais je veux dire c’est pas censé être mon job, d’un autre côté on oublie un peu trop souvent qu’il y a un tas de gens immondes chez les êtres humains, ils ne sont pas l’apanage des Ténèbres.

« J’étais à l’hôpital, mon père. Voulez-vous que je vous produise un certificat médical ?
– À l’hôpital ? Qu’aviez-vous ?
– Un léger accident de voiture, mais je vais très bien ne vous en faites pas ! Pourquoi avez-vous besoin de moi ?
– Écoutez… Je suis un peu débordé ces derniers temps, et je sais que ce n’est pas de votre faute de vous faire renverser, mais… N’oubliez pas que vous êtes lié au diocèse de Cleveland. J’ai besoin que vous m’aidiez un peu par rapport au planning. Vous savez il y a pas mal de funérailles qui sont prévues j’ai besoin de quelqu’un pour les célébrer. Si vous pouviez s’il vous plaît voir Martha à l’accueil pour vous charger de quelques-uns des offices, ça arrangerait beaucoup la paroisse.
– Aucun problème mon père. J’y vais aussitôt. »

L’enfoiré ! Il veut me coller pour faire mes heures. N’importe quoi, genre je suis un diacre absent. Au début du mois j’ai bien aidé à célébrer un mariage, et puis il y a la soupe populaire aussi. C’est quand même pas ma faute de me faire renverser par des voitures. Bon là ce n’était pas le cas mais ça aurait pu, il n’a pas à le savoir.
Je reste très emmerdé par mes obligations de quasi-curé. « Diacre permanent » c’est même pas prêtre, ça a fondamentalement été inventé pour permettre à des gens d’être des semi-prêtres tout en étant mariés parce que le fait de pas baiser faut avouer que ça rebute pas mal de curés et le clergé catholique a du plomb dans l’aile. Mais le fait de pas être prêtre ça m’épargne pas tout le boulot de fonctionnaire religieux. Les mariages, les enterrements, les messes, la soupe populaire, l’association paroissiale qui rend visite à des vieux isolés ; C’est tout ça le boulot de diacre.

Je me dépêche d’aller voir Eiza. Elle porte sa grosse robe de bonne fille qui lui descend jusqu’aux mollets et a noué ses cheveux bouclés en arrière. Je remarque qu’elle a toujours des grosses lunettes et des boutons d’acné qui empirent. Je force un sourire très faux-cul tout en m’approchant d’elle.

« Alors, Eiza, qu’est-ce qui était aussi pressant ?
– Mon père ! Je dois vous montrer quelque chose sur internet ! »

« Et tu crois que ça vaut le coût d’enquêter là-dessus ? »

Scott Willard a pas du tout un profil typique de moine. Ou non, je dis n’importe quoi, il a un profil parfait de moine, mais de moine jésuite. Son gros vêtement noir n’est pas une vieille étoffe de bure, mais une parure magnifique en satin, il porte des gros bijoux autour de son cou et à ses doigts, il n’a pas la tonsure mais s’est entièrement rasé la tête. Son œil en moins a été remplacé par un œil de verre, des cicatrices immondes qui lui ruinent le visage, il est musclé, massif, comme un bouledogue. Et sur sa table, juste devant lui, un verre plein de whisky. Dans le sous-sol de la vieille église Saint Éloi, il cache des bonnes bouteilles de vin et de scotch avec lesquelles il se détend, en n’oubliant jamais d’en offrir aux visiteurs qui viennent dans ces coins privés et interdits aux paroissiens.

« J’en sais rien, t’en penses quoi ? »

Le jésuite soupire. Le smartphone entre ses doigts, il continue de revoir, en boucle, la petite vidéo snapchat que Eiza m’a filé. 574 vues, y a pas de quoi faire le buzz. Mais il sait ce qu’il voit : Il voit clairement un homme foutre ses dents sur la gorge de quelqu’un. Pourtant, Willard reste très sceptique. C’est ça qui est marrant avec les jésuites, ils sont les mecs les plus catholiques du monde et pourtant ils sont sceptiques comme pas deux, tu parles d’une novlangue.

« Dis-moi, Francis, cette vieille mule de Benez t’as pas donné des heures sup’ à faire par hasard ?
– Pourquoi tu me demandes ça ?
– Parce qu’on jurerait que tu cherches une raison de pas les faire en allant chercher des gens qui se font des jeux sexuels en public.
Je vois rien sur ta vidéo. Absolument rien.
– Mais c’est parce que tu vois rien, ça doit être ta condition de cyclope : Regarde encore. Là, pause ici. Tu vois pas ? Tu te doutes pas d’un truc ? »

Eiza sait même pas que je suis réellement chasseur de vampires. Elle est juste terrifiée par tout et n’importe quoi. Elle n’a pas tort car les fantômes existent réellement, mais elle voit des trucs surnaturels partout. En fait, je soupçonne Eiza d’avoir un soucis mental. Je ne dis pas ça avec malice, je suis très sérieux, je pense qu’elle dispose d’un retard mental par rapport à l’être humain moyen, et comme je suis la seule personne assez patiente pour réellement écouter ce qu’elle dit, elle n’arrête pas de me dire tout et n’importe quoi.
En même temps, moi je sais que les fantômes existent. Donc quand elle me dit qu’elle en a déjà vu, je ne me moque pas d’elle comme la quasi-totalité des gens le feraient.

« Pfou… Non écoute moi je vois rien, Francis. Mais je trouve ça suspect que ça se passe juste ici. À Cleveland. Sous notre nez. Je trouve ça presque trop… Évident.
– Tu doutes de ma sincérité ?
– Je dis juste que la ville grouille de chasseurs. T’as des dégénérés à chaque coin de rue qui font partie de l’Amicale de la Légion, on pourrait limite se faire des championnats de bowling. T’as qu’à demander à un des rednecks d’investiguer.
– Le Malleus n’est pas intéressé par cela ? Et notre promesse de traquer les Ténèbres, alors ?
– Tu fais chier putain, me coupe le père Scott en buvant d’une traite une bonne partie de son whisky. Si t’y tiens tellement tu y vas, mais si tu me demandes de me mettre derrière ton cul à te filer du fric et des ressources c’est non, c’est pas comme ça que ça marche. Tu vas tirer tes heures de diacre auprès de la paroisse que tu le veuilles ou non, faut pas que t’oublies que t’es diacre bordel. »

« Hey ! Jeune homme ! »

Le type de la vidéo est derrière son bar. C’est une bonne soirée, l’endroit est plein à craquer. Je suis un peu déçu de voir que les bars se remplissent plus facilement que les églises. Je suis là, en jeans/t-shirt crado, gilet en cuir au-dessus, mon flingue en concealed carry toujours sur moi. Tout sourire, j’aligne un billet sur le comptoir tout en pointant à un alcool derrière moi.

« T’aimes faire les cocktails non ? J’aimerais bien, steuplé, un… Un Whisper. Tu connais ? »

Petit sourire retroussé qui montre mes dents. Avant même qu’il sorte les shakers, je l’arrête subitement, en feignant la surprise.

« Hey mais… Mais je te reconnais ! T’es le mec de la vidéo, là ! Le truc trop bizarre, avec les deux types en mode Twilight ?
Tu vois pas de qui je veux te parler ?
Mec va falloir que tu me donnes des détails là-dessus. Sérieux. Tu sais que le gouvernement nous ment, frère ? Roswell, les Illuminatis tout ça, j’en connais un rayon. »
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Ven 23 Nov - 13:37

Je commence à faire connaissance avec Murphy, avec mon ton rigolard et mes petites semi-blagues lancées à la volée. J’arrive à le faire ricaner, alors qu’il me sert mon Whisper. C’est bien, c’est que c’est un endroit branché : Je n’ai pas l’habitude de boire des cocktails, mais on voit de ces choses quand on est au contact de la bonne société, pas celle qui boit des boissons énergétiques en cannette. Dommage que son Whisper soit fait avec du mauvais Vermouth, j’en garde un sale goût en bouche.

C’est alors que je suis dérangé par une jeune femme qui arrive et fait la bise à Murphy. Le barman me prévient qu’il s’agit de sa tante, et le genre de personne avec qui parler de choses surnaturelles. La dame – qui fait absolument pas l’âge d’être la tante d’un jeune homme comme Murphy, mais je retiens le compliment – lève les yeux aux ciels et semble vite se débarrasser du sujet, comme si elle le trouvait puéril et débile.

« Vous êtes journaliste pour Buzzfeed ou chasseur de vampire pour vous préoccuper de cette anecdote ?
– Chasseur de vampire, exactement. »

Ok, vous allez me prendre pour un débile. Mais il faut que vous compreniez : Parfois pour être en sous-marin il faut se faire passer pour un débile de compét. Il y a des gars, avec des cicatrices, des flingues, des tatouages, des gousses d’ail et des petites fioles d’eau bénite, quand on leur demande si c’est des chasseurs de vampires, il se mettent à bredouiller : n-n-n-n-on p-p-pas du tout. Beaucoup de vampires font pareil, quand on leur demande si le fait qu’ils ont la peau pâle et qu’ils sortent jamais la nuit c’est parce que c’est des vampires, ils rigolent et disent oui. C’est la superstition, je l’utilise pour me protéger comme eux ils font. Avouer que je suis un chasseur de vampire c’est convaincre que j’en suis pas un.
D’ailleurs je me permets d’insister.

« Quoi ? Vous me croyez pas ? Bien sûr que oui les vampires y existent ! Tenez, regardez, sur mon billet de 5 dollars, y a une petite pyramide là, c’est un symbole de la dynastie des Dracul en fait, les Dracul c’est une société de vampires très secrète qui agit dans l’ombre depuis le XVe siècle ! »

Ce que je dis est faux bien sûr – Non pas que Vlad Tepes dit « Dracul » ne soit pas un vampire, c’est un gros secret de polichinelle, mais on a pas la preuve qu’il soit à l’origine d’un quelconque clan vampirique. En plus, il n’y a pas une quelconque forme pyramidale sur les armoiries de la maison des Drăculești, pas plus sur celles des Basarab.

« Mais qu’est-ce qui vous fait croire que c’est des types qui aiment Satan ? Je veux dire… C’est quoi le lien ? Moi sur la vidéo je vois juste deux types qui se mordent le cou, hein.
Vous savez des choses que j’ignore sur eux ? C’est des clients que vous connaissez ? »
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Dim 25 Nov - 0:08
Caïn.
Si j’avais cru entendre ce nom à ce moment précis…

Bon déjà c’est bien gentil de pas répondre à ma question en rajoutant une autre connerie par dessus. Elle a eu de la chance de s’enfuir directement en ayant un petit rot de nausée très visible, parce que j’allais lui demander d’où vous savez qu’un Vampire ça croit en Caïn ?. Je l’aie bien regardée partir, en la fixant, même quand j’ai ramassé mon cocktail de bourge posé sur le comptoir pour commencer à le descendre en quelques gorgées.

Caïn, père des Vampires. C’est ambivalent, comme mot. Où est-ce qu’elle a entendu ça ? Dans un vieux film polonais muet et en noir-et-blanc ? Dans un jeu de rôle de petits geeks boutonneux qui s’inventent des vies plus passionnantes que la leur ? Ou bien… Ou bien…
Je vous avoue que j’étais un peu venu ici en pensant que c’était une piste froide, par simple esprit consciencieux de limier. Mais alors là. Là, je me sens un peu fébrile. Je suis content d’avoir des pieux en bois dans mon coffre, à côté d’un sabre de gendarmerie et d’un pistolet chargé en .45 ACP.

Mais maintenant que je suis un peu tranquille, je peux me retourner face à Murphy, qui est là à ricaner, et qui est déjà parti pendant ma petite discussion avec Dunlaith pour discuter avec un client juste à côté.

« Et, heu… Du coup, le… Le type qui a mordu.
Il vient souvent ici ? »


Murphy sourit au client et lui demande pardon, et pivote un peu pour me regarder. Il me répond pas de suite, peut-être parce que son cerveau essaye d’analyser ce que je viens de dire. Il se met à supprimer son petit sourire, et à prendre un air tout sérieux pour me répondre.

« Non… Non aussi loin que je m’en souvienne… Le type me dit rien.
Mais la fille, elle vient souvent ici ! Je la connais pas trop-trop mais c’est un peu une hipster, elle vient plus en journée que le soir, elle écrit un roman figurez-vous !
– Ah. »


C’est intéressant en vrai. La moindre petite information, même parcellaire, peut m’être très très utile pour la suite.

« Mais, du coup… Vous l’avez revue depuis ?
– Heu… Bah… Maintenant que vous le dites… ça m’avait pas trop choqué mais… Mais non, non je ne l’aie plus revue. »


Très. Très intéressant.
Je sors de ma poche un tout petit calepin et un stylo, sur lequel je commence déjà à écrire mon numéro. Mais sans regarder Murphy, mon attention concentrée sur la feuille, je continue de lui parler.

« Et… Le Vampire, du coup. Qu’est-ce que vous pouvez m’en dire ? Comment le décriveriez-vous ? J’ai très peu vu sur la vidéo live, tentez de vous remémorer des détails. Est-ce qu’il avait une marque particulière ? Une attitude ? Une… Une odeur ?
– Monsieur, je… Je vais vous demander... »

Murphy prend un air faussement emprunté. Il s’approche et se penche juste au-dessus de moi, pour me chuchoter, en regardant par-dessus son épaule que les clients du bar ne l’espionnent pas.

« Ce type, c’est… C’est vraiment un… Un…
Un Vampire ?
Il bredouille en baissant encore plus la voix pour le dernier mot.
– Je n’en sais rien.
– Non parce que, si c’était un Vampire…
ça serait trop cool ! Sérieux ! »


Je crois que la plus grande tragédie de notre monde actuellement est que nous vivons dans une époque où on vénère les Vampires. Je suis persuadé que 95 % des victimes vampiriques le sont de leur plein gré. Nos sociétés ne manquent pas de jeunes filles et de jeunes hommes pseudo-gothiques qui ne rêvent que de se faire mordre, je pense que c’est un peu du même calibre que d’avoir un compagnon plus vieux, ou noir : ça fait exotique. Alors imaginez, le vampire vieux et noir, on a le tiercé gagnant, ding ding ding.

« Vous n’avez rien à noter, Murphy ?
– Non. Non je vous jure, je… J’essaye d’y réfléchir, mais rien me vient. Une odeur ? Ça sent quelque chose de particulier un Vampire ?
– Non, ils sont morts ils n’ont aucune odeur, mais leurs vêtements peuvent en avoir, même si ça ne provient pas de leur transpiration. Et certains aiment se parfumer…
J’explique non sans avoir une pensée pour les Toréadors.
– Bah non. En même temps je renifle pas les gens monsieur. Mais hey, c’est vrai que les gens qui sentent rien ça peut être un bon moyen d’identifier les Vampires !
Les Vampires ça peut aller au soleil monsieur ? »


J’en ai déjà trop dis. Il a une espèce de fascination pour le surnaturel, ça se voit. Des gens comme lui il y en a trop, sinon les voyants et les marabouts ça marcherait pas autant. Mais ça me fatigue. Moi je fais du travail sérieux, je guéris pas les problèmes d’érection et je lis pas les astres, je suis un professionnel qui fait partie d’une société réputée et basée sur la méthode scientifique.
D’ailleurs je viens de penser qu’il ne faudra pas que je lubrifie la lame de mon sabre avec de l’huile sainte et que je lave mes balles avec de l’eau bénite par un évêque. C’est vital.

« Je vous donne mon numéro, Murphy. Si vous revoyez la jeune femme, vous me contactez directement, d’accord ?
– Très bien, je le ferai »
, il rajoute d’un air déterminé.

Alors que je viens juste de terminer cette discussion, je peux enfin terminer mon Whisper, quand la jeune femme revient visiblement des toilettes. C’est alors qu’elle se met à m’agresser verbalement, et à me tenir des propos incohérents, qui me font un peu rigoler.

« Mais enfin mademoiselle, ça n’a pas de sens ce que vous dites. Déjà parce que Buzzfeed je les vois pas trop frapper des gauchistes. Et ensuite parce que la barbe c’est très souvent porté par des cucks qui veulent avoir l’air viril. Vous voulez que je vous dise ? C’est à force de bouffer du soja qu’ils ont l’air aussi immondes. Tenez, si sur mon portable il y a internet je peux peut-être vous montrer quelques brillants exemples de mecs immondes avec des barbes… Non attendez je capte pas le wifi. Vous, là, tapez dans google : soyboy nu-male. S-o-y-b-o-y. »

Pendant qu’elle fait ça (Ou non), je me retourne et tapote la table pour alerter Murphy qui est déjà reparti parler à l’autre client juste à côté de moi – il n’a pas beaucoup d’attention ce jeune homme.

« Remets moi- Non ne me remets pas un Whisper. Ça coûte cher, c’est juste un cocktail fait pour faire précieux, met-moi… Heu.
Dunlaith ? Met-moi la même chose que Dunlaith. »


Elle a dit Caïn. Alors, cinéphile de vieilles projections polonaises, geekette qui sent mauvais, ou bien créature de Satan ? Il faut que je le découvre.

« Mais moi je suis un Républicain. Je suis inscrit au GOP depuis que j’ai l’âge de voter. Américain patriote et craignant-Dieu, attaché à mes armes, mon chien et mon pays.
Je me suis même pas présenté d’ailleurs, c’est vraiment une preuve de manque de savoir vivre, pardonnez-moi.
Je m’appelle François. Je sais, c’est impossible à prononcer, essaye de le faire toi », je continue en rigolant déjà à l’idée de la faire répéter trois fois « François » en accent français.
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Mer 28 Nov - 16:56
« Cleveland ça se gentrifie pourtant… C’est pas Détroit non plus. »

Je pince un peu les lèvres et fait un sourire très gêné. Que je suspecte Dunlaith d’être un vampire est déjà assez mauvais comme ça, mais qu’elle soit raciste c’est pas mieux. J’ai mes souvenirs des dîners de famille avec tonton qui reviennent. Une fois ma sœur a ramené un noir à la maison comme copain je vous jure que ça a été explosif, j’ai passé le repas à boire des verres d’eaux pour éviter d’avoir à répondre ou relever des réflexions un peu bizarres.
Au moins on est d’accord sur le port d’armes. Je peux pas m’empêcher de faire oui de la tête en terminant mon verre.

« A well regulated Militia, being necessary to the security of a free State, the right of the people to keep and bear Arms, shall not be infringed. Là d’où je viens tout ce qui m’a marqué c’est la fête des canards et les flingues. C’est pour ça que j’aime bien vivre ici, dans l’État de l’Ohio : On me demande même pas de background check pour garder mes armes. »

Et ayant dit ça, je tire un peu mon manteau pour lui montrer mon holster dans lequel je garde mon pistolet, solidement ancré sous l’aisselle.

« Sig Sauer P220, j’ai pris la version en .45 ACP plutôt que le 9mm parce que comme ça j’ai pas à utiliser des munitions spéciales quand j’utilise un suppresseur.
Vous-même vous avez des armes ? »

Elle me montre son arme, également bien dans un holster, sauf que elle le porte à la hanche. Elle m’explique que c’est un Arex 9, je lui fais répéter parce que j’ai jamais entendu le nom de cette entreprise. On en discute un peu, comme deux gros beaufs qui collectionneraient des timbres, mais elle ajoute que ce qu’elle préfère en Ohio c’est le fait qu’on ait pas l’obligation de déclarer qu’on fait du open carry. Malgré tout, l’Ohio est soumis aux limitations fédérales, et ça c’était un problème avant que Trump et les Républicains soient au pouvoir. On tremble toujours un peu pour nos flingues malgré tout. Je lui raconte que je vais souvent à Chicago et que là-bas j’ai été obligé de payer une licence de non-résident de 300 dollars pour pouvoir franchir la frontière avec le pistolet dans la boîte à gants.
Mais assez perdu de temps à tailler le bout de gras. Je ne prendrai pas de 3e verre. C’est important d’être sociable pour faire de l’infiltration, mais il ne faut pas se brouiller les sens. La piste commence à devenir tiède ici, je n’en apprendrai pas plus en restant ici, alors après avoir dit des dernières politesses, j’aligne les billets pour payer Murphy, avec un petit pourboire, et je salue les deux avant de m’éloigner en rappelant à Murphy qu’il faut m’appeler si la fille revient ou qu’ils ont une information sur des vampires.

« Tu les trouves peut-être fascinantes, mais ce sont des créatures extrêmement dangereuses. N’oublie pas, hein, de m’appeler. »

Au moins je suis à Cleveland. Le soir je peux aller dans mon appartement et dormir dans mon lit, un luxe auquel je suis de moins en moins habitué.

***

Le matin était l’heure creuse du lapin survolté. C’est le paradoxe des commerces comme les bars et les nightclubs : La nuit est le temps de leur activité, le jour est le moment où ils deviennent calmes. La turbulence de la circulation encombrant la chaussée et des trottoirs noirs de monde tranche avec le vide de l’établissement où Murphy est en train de faire le ménage en baillant. Tout comme sa tante, lui aussi est un enfant de la nuit, sans même être un enfant de Caïn. C’est lorsque le soleil se couche qu’il peut enfin travailler, et après une nuit longue, il se prépare pour la prochaine à venir, ne se couchant que l’après-midi pour se recharger.
Il aime ça. Il aime parler, rire, servir à boire. Il aime cette ambiance épuisante et bruyante qui lui donne des acouphènes aux oreilles. Il aime ses potes, les soirées, les blagues et la tchatche. Il a beaucoup de défauts, mais certainement pas celui d’être paresseux : Alors qu’il a fait une nuit blanche, il est là, à entretenir le bar, à tout nettoyer à l’éponge et à la persillère, à poser les tabourets sur les tables et à récurer les verres qu’il récupère, parfois renversés ou ayant laissé de la saleté sur le comptoir (Les gens sont énervants de ne pas utiliser les petits dessous de verres Coca-Cola®️). Au milieu de sa corvée, il trouve même le temps de bondir à nouveau derrière la caisse, pour servir les rares clients de la matinée, qui pour le coup ne viennent pas chercher de la bière ou des cocktails qu’il prépare au shaker, mais des cafés avant d’aller au travail, qu’il prépare au percolateur.

Il regarde l’heure en courant dans tous les sens. Bientôt 7h, et la fin de son service ; Il fait beaucoup d’heure qu’il rattrape avec des jours entiers de libre. Dehors il fait encore nuit noir, la faute à l’heure d’hiver. Il guette pour voir l’arrivée d’un nouveau collègue, parce que pour l’instant il tient la baraque tout seul avec un autre employé qui est occupé à également faire le ménage et servir les cafés.
D’ailleurs, en quittant le comptoir, il le voit traverser la salle avec des seaux et des produits d’entretien à la main.

« Hey Murphy ; Je vais faire les chiottes. Tu peux t’occuper d’encaisser les clients dans l’arrière-salle ?
– Ouais y a pas de problème ! »

Il termine de frotter le comptoir, puis jette un torchon sur son épaule, récupère le porte-monnaie de l’établissement et va dans l’arrière salle plongée dans le noir. Il y a deux clients qui sont face-à-face sur l’une des tables et qui ont posé de l’argent dans un coin. Murphy les salues et récupère l’argent, ainsi que les deux petites tasses de café qu’il se prépare à ramener pour les laver. Mais alors qu’il se tourne, il s’arrête très vite, ses semelles cirées crissant sur le sol.
Il y a une fille avec des écouteurs qui est scotchée à son ordi portable, sur une banquette tout au fond du bar, à côté des deux flippers. LA fille. Murphy hésite. Il regarde à droite, puis à gauche, puis finalement décide de s’approcher. Elle fait jeune mais quand même adulte, elle porte du noir et beaucoup de maquillage, trois boucles dans une seule oreille et un tatouage qu’il découvre en partie sur son omoplate. Le jeune barman reste devant elle avec un grand sourire, mais la fille ne le remarque qu’après quelques petites secondes de battement, trop scotchée à son ordi. Elle retire ses écouteurs et reste bouchée bée, un peu hésitante.

« Heu… Oui ?
– Pardon, désolé de te déranger. Je m’appelle Murphy. Tu t’appelles comment ?
– Kate.
– Salut Kate. Je peux te parler deux minutes ? »

Kate n’a pas le temps de répondre. Murphy pose les tasses et s’assoit en face d’elle. Kate fronce ses sourcils blonds qui tranchent avec ses cheveux noirs (C’est original ; D’habitude c’est les brunes qui se teignent en blondes, pas l’inverse). Elle a l’air en colère. Elle s’attend à se faire draguer par un mec relou, ça arrive plus souvent qu’elle le voudrait.

« Tu viens ici souvent, non ?
– Non. Non pas vraiment.
– Je t’ai vu une autre fois… C’était y a quelques jours maintenant. T’étais avec un homme non ? C’était ton copain ?
– Euh… ça te regarde ?
– C’est pour savoir. »

Murphy reconnaît quelque chose. Un petit tic, une micro-expression, un mot qu’il a appris en regardant la série Lie to Me et qui fait que maintenant il est persuadé d’être un expert : Kate déglutit, on voit apparaître un mouvement sur sa gorge. Elle n’est pas agacée. Elle a peur.

« Oui, répond-elle finalement d’un ton qu’elle s’efforce de faire rauque.
– Ah oui, je me doutais, parce que tu vois j’étais un peu curieux et je me demandais…
C’était quoi votre truc avec la gorge, là ?
– ...Hein ? »

Malheureusement, le jeune homme n’était pas le plus discret ou le plus subtil des américains. Et là, il pouvait carrément voir qu’il mettait mal à l’aise la pauvre Kate qui n’avait soudain plus envie de terminer son latté qui traînait à côté de son ordi.

« Bah… Il t’a mordu. J’ai trouvé ça super bizarre quand même. C’est quoi ? C’est un délire chelou à la Fifty Shades of Grey ?
– Mais ça te regarde pas ! T’es qui putain ?!
– Non non tu me comprends pas du tout ! Je suis un type ouvert d’esprit hein, je suis juste curieux ! »

Elle se dépêche de sortir son sac. Elle sors des pièces qu’elle fait rouler sur la table avant de se lever, tout en claquant le capot de son ordi pour l’emporter sous le bras.

« Je reviendrai pas ici maintenant, c’est sûr.
– Non attend deux minutes ! Reste je connais quelqu’un qui veut te parler, c’est très important et- »

Elle s’enfuit rapidement, malgré les talons de ses grosses bottes gothique qui risqueraient de lui faire perdre l’équilibre. Murphy se dépêche de prendre toutes les tasses à café et l’argent dans son porte-monnaie avant de se lever et de la suivre. C’est là qu’il aperçoit que son collègue censé venir à 7h est déjà derrière la caisse, il vient probablement de pas arriver depuis longtemps. Murphy trotte pour lui poser les tasses sous le museau et lui serrer franchement la main par-dessus le comptoir avant de faire une rapide diarrhée verbale :

« Salut, check, ça va ? Désolé mais là j’suis vraiment très très pressé tu permets j’me barre comme un voleur je laisse tout en plan ? Je te jure d’habitude je fais pas ça mais là c’est urgent. Ok ? Désolé ! »

Il pose le torchon de son épaule sur la table, il retire le linge qu’il a autour de la taille et le porte-monnaie. Il trotte d’un pas très rapide jusqu’à l’arrière-salle où il va récupérer son manteau et ses clés de voiture, puis il se faufile derrière par l’issue de secours. Quelques pas sur le trottoir, il se recouvre vite en fermant sa fermeture éclair jusqu’en haut car il fait un froid qui picote dehors. Il tente de rapidement retrouver la fille, en marchand au pas de course et en regardant dans tous les sens.
Il découvre Kate. Une silhouette qui passe sous les réverbères encore allumés. Une voiture noire, une magnifique importation allemande aux vitres teintées où la jeune femme s’engouffre sur la banquette arrière. Murphy se dépêche de traverser la route en ne respectant pas le passage piéton pour aller chercher sa voiture à lui – une Chevrolet Matiz d’occasion – avec laquelle il s’essaye à la filature policière.

Il route. Nerveux, paniqué, mais poussé par une sorte de courage étrange et plus fort que lui, il se met à traquer la belle voiture devant lui. Il le prend comme un jeu. Il n’est pas en train de faire ça par obligation ou fanatisme. Il fait ça parce que c’est un débile trop curieux pour son bien. Sa mère lui a appris beaucoup de choses, comme don’t run with scissors et don’t tell the Lord’s name in vain, mais elle a oublié de lui apprendre curiosity killed the cat. Il suit la voiture le long des routes de la cité de Cleveland qui commence tout juste à se réveiller, les gens sont en train de prendre leur petit-déj bacon-œufs avant de s’engouffrer sur les routes trop étroites pour assurer des flux qui ne soient pas plein de bouchons. Murphy a légèrement peu, mais c’est camouflé par son adrénaline débile et cette sensation étrangement excitante de suivre illégalement quelqu’un sur une route parce qu’un abruti qui boit des cocktails lui a dit que les vampires existent. Murphy n’y croit pas, bien sûr, mais il pense aux vues s’il fait un live snapchat, il pense à l’histoire qu’il va pouvoir raconter, il tremblotte du bout des doigts.
Il n’est pas alerté par le fait que la voiture emprunte des petites routes, et se met à quitter Cleveland pour aller en banlieue très éloignée des beaux quartiers en cours de gentrification. Il ne trouve qu’intelligent d’appeler sa tante.

« Hey, Dunlaith ? Bordel, tu croiras jamais ce qui s’est passé ! »

Si Murphy aimait les vampires, il aurait mieux fait de s’intéresser à sa tante. Homme de la nuit, il n’avait jamais été alerté par le fait qu’il ne l’avait jamais vue de jour. Elle était dans son appartement, à se préparer à entrer en « sommeil », tous les rideaux tirés et les volets fermés pour pouvoir tranquillement être à l’abri du soleil, malédiction divine causée par l’Archange Raphaël.

« J’ai retrouvé la fille qui a été mordue par le vampire ! Je suis en train de les suivre en voiture. »

La débilité de l’arrière-arrière-arrière-petit-neveu de Dunlaith l’obligea à hurler. Il ne se rendait pas compte d’à quel point il se mettait en danger. Elle lui demanda malgré tout où cet idiot se trouvait :

« Heu… Bah là j’ai dépassé l’aéroport. Je suis sorti de la ville. Je crois que je suis près de Brook park, je suis pas sûr. Je...
Je peux pas la laisser ! Elle est peut-être en danger ! »

Dunlaith insista pour qu’il fasse demi-tour. Il était étonné d’ailleurs. Il y avait de l’insistance dans sa voix, pas juste une mention passive pour faire comprendre à Murphy que non il n’était pas hanté par un fantôme et que non le type très musclé et poilu qui vient boire de la bière tous les samedis n’est pas un loup-garou. Murphy croyait aussi aux aliens et aux illuminatis, mais on ne peut pas toucher du bout des doigts la vérité à chaque fois.

« Merde, je dois raccrocher. »

Une patrouille de police empruntait la petite route sur laquelle la Chevrolet s’enfonçait. Il raccrocha au nez de sa tante et jeta son portable sur le siège passager vide. Il continuait de suivre au loin la belle berline allemande qui s’éloignait sans aucune hésitation, jusqu’à ce qu’elle prenne à gauche et quitte la route pour s’enfoncer dans un très grand parking de gravier.
Il y avait là de grands entrepôts désaffectés. Le panneau rouillé devant la grille ouverte et attaquée par la végétation indiquait : «  Ed<..>’s & So<..>s Proce<… ….>gs Slaug<...>use ». C’était de mieux en mieux. L’abattoir c’est l’un des meilleurs cadres de film d’horreur, avec le manoir et la fête foraine. Murphy voulait immédiatement allumer son téléphone, dommage qu’à 7h passées il n’allait pas y avoir grand monde pour faire un live. Mais avant de mettre en marche snapchat, il eut l’intelligence de chercher dans sa boîte à gant quelque chose.
Il était bordélique. Au milieu de sa boîte à gant se cachaient des vieux paquets de kleenex, une paire de gants, les papiers du véhicule, des choses et d’autres que des gens avaient rangé et avaient oublié ici. Il farfouillait partout, laissé un paquet de clopes entamé tomber, avant de finalement tirer le post-it que le mec d’il y a quelques jours lui avait confié. Il tenta tant bien que mal de coller le post-it sur le volant de sa voiture, tandis qu’il tapait sur son smartphone le numéro avant de le coller à son oreille.

Tonalité. Tonalité. Tonalité.

« Qui est-ce ? Demanda une voix masculine un peu enrouée.
– Ouais, heu… B-bonjour ? C’est euh… Je sais pas si vous vous souvenez de moi. Murphy ? Le lapin survolt-
– Oui, oui ! Murphy. Je me souviens.
Que se passe-t-il, Murphy ?
– Je… J’ai trouvé la fille, vous m’aviez dit de vous appeler si je vous trouvais. Elle est montée dans une voiture j’ai trouvé ça très louche…
– Vous l’avez suivie ? Murphy, je vous ai dis que c’était dangereux. Où êtes-vous ?
– Heu… Derrière l’aéroport, Brook Park, je suis devant une usine abandonnée… Je crois… Le panneau est illisible, je suis pas sûr de ce que c’est. C’est grand, vide. Beaucoup d’arbres autour. C’est après Sheldon Road, et-
– C’est très bien Murphy. Maintenant écoute moi. Tu vas m’envoyer une photographie. Ok ?
– Ok. »

Le smartphone était véritablement un outil incroyable. Murphy s’exécuta aussitôt, en prenant le meilleur angle possible, malgré le peu de lumière – le soleil commençait à peine à se lever, laissant une teinte rouge-sang dans le ciel – et ses doigts qui tremblotaient de nervosité. Il envoya le tout, et il y eut un petit silence le temps que l’étranger télécharge l’image.

« Ok. C’est parfait Murphy. Maintenant fais demi-tour, rentre chez toi et oublie tout.
– Mais… Heu… Je dois pas faire quelque chose ? Vous allez venir tout de suite ? Je peux rester ici et vous prévenir si quelque chose bouge !
– Non. Tu rentres chez toi et tu oublie tout. C’est extrêmement important Murphy. Va chez ta tante. »

Murphy ne raccrocha pas tout de suite. Il avait cru voir quelque chose bouger. Les murs en pierre qui entouraient le bâtiment désaffecté ne lui permettaient pas de trop voir, mais il savait qu’il y avait quelque chose. Il garda le smartphone allumé dans sa main tandis qu’il levait un peu ses fesses pour tenter de mieux voir.
Le soleil serait levé dans à peine un quart d’heure. Cela peut changer beaucoup de choses, un quart d’heures. Cela peut changer une vie. La protection des rayons de l’astre lui auraient permit de rentrer chez lui serein, et d’obéir au conseil de l’étrange chasseur autoproclamé qui lui filait un numéro de téléphone, mais pas son nom.
Un quart d’heure. C’est tout ce qu’il faut.

La vitre passager derrière lui explosa. Murphy se retourna tout-de-go, quand il aperçut… Quelqu’un ? Quelque chose ? Difficile à dire : Un spectre entre l’homme et la bête qui ouvrit de force la portière et se jeta à l’intérieur. Murphy hurla en levant son pied pour tenter de repousser la silhouette, grande et massive. Mais plutôt que de réussir à lutter, il ne fit qu’offrir une opportunité d’être abattu : Des pattes horribles, ressemblant à peine à des mains, lui saisirent le mollet et le tirèrent avec une force digne d’un boxeur shooté à la testostérone. Il tenta un instant de se rattraper à son volant, et klaxonna ; Son autre jambe, se coinça et lui fit extrêmement mal lorsqu’il continua d’être tiré hors de son véhicule. Malgré la lutte de toutes ses forces pour se tenir à la sécurité de l’habitacle de sa vieille Chevrolet d’occas’, il se retrouvait dehors, peu importe ses cris agonisants.
Il cessa tout bruit lorsque, jeté dans le sol, il vit les yeux pétillants et semi-brillants de la chose au-dessus de lui. Ni homme, ni bête.

« Murphy ? »

***

Gilet pare-balle sur le torse. Col romain autour du cou. Mon fusil Remington 870, qui normalement attend sagement dans le coffre, est posté sur le siège passager. Gants de conduite sur la voiture. Plan Google Maps imprimé et scotché sur le tableau de bord (Je n’ai pas de GPS). Je conduis comme un fou, dans le noir de la nuit. Ma bouche pue très fort le café que je n’arrête pas d’engloutir depuis que j’ai reçu l’appel tôt ce matin.
La photo de l’usine qu’il m’a envoyée est attachée juste à côté du plan. Ça pue. Je savais que ça puait. Ça me prenait aux tripes. Eiza avait étonnamment raison : Cette affaire cachait quelque chose. Quelque chose d’immensément grave. J’avais passé la matinée entière avec mon collègue de la Légion, Billy, pour qu’il me fasse une recherche internet sur des endroits avec des entrepôts désaffectés en banlieue de Cleveland. L’agrandissement systématique de l’aéroport Cleveland-Hopkins et les récessions économiques des années 70-80 (Merci le choc pétrolier et la Révolution Iranienne) avaient malheureusement fait grossir le nombre de candidats à surveiller. Billy n’avait de plus pas beaucoup de motivation à m’aider à faire ce qui n’était au final que des recherches google, puisqu’il avait un date tinder à aller voir à 14h, et il ne pouvait pas non plus faire du hacking magique pour tenter de me localiser le portable de Murphy, qui de toute façon s’était subitement éteint à 8h02, coupant un appel très long que j’avais gardé en croyant pouvoir en faire quelque chose. Il fallait que j’appelle mes collègues, le Malleus et la Légion, et qu’on enquête tout de suite. On était à Cleveland, on était chez nous, on pouvait pas tolérer une disparition à suspicion vampirique, ça serait inacceptable. Au moins, je me sentais plutôt apaisé. Je n’étais pas en terrain étranger. Si j’étais réellement en danger, une masse de chasseurs clichés à souhait pourraient me porter secours, ce n’est pas comme si j’étais livré à moi-même à Chicago ou Détroit.
Mais en attendant qu’on m’envoie de l’aide et du renfort, j’étais tout seul, et j’avais prévenu que je ne souhaitais pas perdre du temps sur cette affaire. J’étais impliqué. Je ne m’en voulais pas, je ne pouvais pas savoir que ce crétin de Murphy allait jouer au héros, mais malgré tout je me sentais le devoir de régler la situation.

Je roulais le long de routes peu fréquentées quand j’aperçus une voiture qui était à l’arrêt sur une bande d’arrêt d’urgence. Je passais rapidement avant de subitement ralentir plus loin et m’arrêter également.

« C’est pas vrai. »

J’enclenchais la marche arrière, ce qui était très dangereux sur ce genre de route, mais je me retrouvais jusqu’au niveau du véhicule. Il y avait un peu d’arbres qui descendaient jusqu’à la Rocky River, et là j’apercevais une femme qui observait par-delà la rivière avec des jumelles.
Je crois qu’elle m’avait aperçu.

Je me garais juste en face de la bagnole, laissait le moteur tourner, et me saisit de mon Remington avant de sortir. Je claque la portière passager et contourne mon véhicule pour aller jusqu’au petit chemin, fusil à pompe dans une main. Je salis mes rangers qui remplacent mes jolies chaussures de ville dans de la boue tandis que je descend le petit chemin, et vais jusqu’à la femme devant laquelle je m’arrête, séparé de quinze pas.

« Dunlaith. »

Je fronce les sourcils. Je suis pas sûr qu’elle soit une vampire, je suis un homme très paranoïaque, mais je me sens quand même rassuré par mon fusil à pompe chargé aux cartouches Dragon Breath. Si c’est une humaine, je ne m’inquiète pas. C’est une fana des armes à feu, je pourrais toujours mentir que je suis ici en route vers un stand de tir ou une connerie de ce genre.

« Où est Murphy ? »
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Jeu 29 Nov - 16:31
Jusqu’où sommes nous prêts à aller, durant notre service pour la gloire de Dieu ?

Ce qui est marrant dans ce travail, c’est que la surprise est ce qui fait absolument tout. Le chasseur chasse, le vampire chasse, dans cet emploi l’avantage est toujours à celui qui saura qui est la proie et qui est le prédateur avant l’autre. À partir du moment où on brise le voile en même temps, c’est beaucoup plus complexe.
Les vampires sont des créatures de Satan. Leur existence seulement est déjà une souillure insoutenable pour le genre humain, d’un part, est un danger constant pour notre salut en second lieu. Mais Murphy ? Murphy n’est pas tourné. Ça je le sais. J’en suis entièrement et totalement sûr. Il a été capturé, et ça commence à ne pas sentir bon. Avant de prendre une décision quant à Dunlaith, il faut que je découvre ce qui se passe dans l’usine où il a été capturé.

Avant de partir, j’ai demandé à Dunlaith de m’emprunter ses jumelles, tout en lui montrant la photographie que son neveu lui avait envoyé. Nous étions maintenant véritablement sûrs que c’était là-bas qu’il était revenu. Alors, je suis remonté dans ma voiture et je l’aie suivie jusqu’à chez elle.

Je vous avoue que je n’ai pas arrêté de tenir mon fusil à pompe, même en entrant chez elle. Je me suis quand même nettoyé les pieds sur le paillasson où il y avait écrit Fáilte, puis j’ai fais un peu de « ménage » en retournant la nappe comme elle me le demandais, mon Remington en bandoulière et prêt à dégainer à chaque instant. C’est volatile, le Dragon Breath. Si j’en tirais à l’intérieur, je me demandais si je risquais également de cramer.

« Pourquoi vous faites ça ? »

La question méritait d’être posée quand même.

« Je veux dire… Murphy. C’est qui pour vous ? Vraiment votre neveu ? Pourquoi vous faites ça ? »

D’habitude les vampires en ont bien rien à foutre des mortels. C’est pas obligé qu’ils nous voient juste comme des sous-êtres qu’ils peuvent tuer librement, mais je veux dire, leur sens empathique envers les mortels est très limité. C’est comme, je sais pas, notre sens empathique envers les vaches. Moi je passe pas mes après-midis à tabasser des vaches dans les champs avec une batte de base-ball mais ça veut pas dire que je me fais chier à aller en sauver une à l’abattoir. Bien sûr il y a des groupes de défense des animaux qui ont rien de mieux à faire de leur vie que de sauver des vaches, mais ils sont une énorme minorité. Bah pour les mortels et les vampires c’est exactement pareil. Ça me rend quand même pas mal curieux.

Après notre discussion, je vais visiter la cave de Dunlaith comme elle m’y encourage. J’y vais quand même d’un pas peu assuré, et en jetant des coups d’œil derrière mon épaule, des fois que sa cave cache une salle de torture improvisée où elle va me retenir. Mais non. C’est tout autre chose que je découvre.

« Jésus, Marie, Joseph. »

Le flic de la police d’État de Louisiane qui est en moi se réveille. C’est lui qui est terrifié, pas le diacre catholique. En tant que State Police traquer les trafiquants d’armes à feu faisait partie de mon boulot et de mes enquêtes, beaucoup plus que les homicides d’ailleurs. J’en ai fouillé des camions qui venaient du Texas et des cales de bateaux dans la rade de la Nouvelle-Orléans. Je peux vous dire que Dunlaith elle a plus à craindre les autorités que les chasseurs fanatisés traquant des monstres surnaturels.
Y a assez de matériel là-dedans pour raser le pâté de maison, et peut-être celui d’à côté. Je me ballade au milieu de ce magasin de bonbons pour milice extrémiste. Je suis sûr que même nos boys en Afghanistan ils ont pas tant de munitions dans leurs avants-postes. Dans une caisse ouverte au fond, qui est empilée sur 3 autres caisses, c’est rempli de carabines M4. Y a aussi des choix d’armes plus exotiques que les typiques dérivés d’AR15, si vous jouez à Call of Duty je pense que vous pouvez en reconnaître pas mal. Y a un petit nombre de fusils français FAMAS rutilants et âgés dans un coin, probablement parce que les frenchies sont en train de les remplacer. Y a des tas de boîtes de munitions qui traînent, surtout du 9mm et du 5.56, on reste dans le classique. Des grenades offensives, du C4, et puis des produits bruts qui sortent de magasins de bricolage. Me dites pas qu’elle est en train de préparer des explosifs artisanaux ? Je me demandais si mes Dragon Breath risquaient d’être volatiles. Je mets immédiatement le cran de sécurité à mon fusil à pompe, parce que si quelqu’un tire une balle dans cette cave il va falloir renommer la zone Ground Zero.

« Bordel de merde Dunlaith ! Je crie depuis l’escalier qui mène à la cave. Donnez moi une bonne raison de pas appeler l’ATF ! À part qu’ils sont des dégénérés qui butent des enfants et des chiens bien sûr. »

Je pose mon shotgun sur une petite table où il y a des outils qui permettent de fabriquer des cartouches personnalisées. Je me retrousse les manches et je cherche de quoi m’équiper.
En vrai, on ne sait pas trop à quoi s’attendre dans l’usine que nous allons attaquer, mais je n’ai pas besoin d’une artillerie absolument incroyable. La plupart des articles en vente dans les magasins d’armes à feu n’ont qu’une efficacité très relative contre les créatures de Satan, et paradoxalement, c’était au moyen-âge qu’on avait les meilleures armes contre eux : Des épées pour les décapiter, des arbalètes tirant des carreaux de bois pour les fixer… La seule chose qu’on a grandement amélioré de nos jours, c’est notre utilisation du feu. C’est d’ailleurs ce que je cherche au milieu des caisses d’équipement : Des balles incendiaires, des grenades au phosphore, de quoi pouvoir donner tout son sens au terme feu et choc.

Alors que je suis tranquillement en train de faire mon shopping, j’entends quelqu’un sonner à la porte. Je sors mon pistolet de son holster, et me cache contre le mur de la cave, juste devant les escaliers, afin de pouvoir voir et entendre ce qui se passe.

***

Une voiture bleu métallisée se gare devant la maison. Une Suzuki familiale 5 portes, une voiture commune de bon père de famille. Le contact est coupé et le conducteur met un petit moment à sortir : Il rassemble ses papiers. Lorsqu’il ouvre la porte de sa voiture, il porte un petit attaché-caisse à la main. Il n’oublie pas de fermer à clé sa voiture avant de s’avancer jusqu’à la petite maison à la grosse porte blindée qui demanderait à l’ATF de la démolir avec un gros paquet d’explosifs si un jour ils décidaient de se rendre jusqu’ici. L’homme est petit. Un tout petit peu grassouillet. Cinquantenaire, peau très blanche et cheveux blonds. Il porte un chapeau des années 40 sur sa tête et des petites lunettes de vue sur ses yeux. Un costume cheap de mauvaise facture mais très propre, il n’a pas une poussière ou un faux-pli dessus, avec chemise blanche très propre et cravate bleu-marine. Ses chaussures de ville bien cirées et polies marchent sur les dalles salles et gagnées par la verdure qui traversent le petit jardin. Il se rend jusqu’à la porte blindée, et sonne, avant d’attendre poliment. Le judas blindé coulisse et il se retrouve nez-à-nez avec Dunlaith. Malgré l’apparence de l’homme, il est beaucoup trop tard pour que ce soit un témoin de Jéhovah ou un vendeur d’encyclopédies. L’homme fait un grand sourire, peu naturel : C’est un sourire assez grand pour qu’il montre ses crocs.

« Bonsoir mademoiselle McDouglas, fait-il avec un très très léger accent bien maîtrisé. Pourriez-vous, s’il vous plaît, me laisser entrer chez vous ? »

Elle n’avait aucune raison de lui ouvrir. Mais quelque chose dans sa voix était très étrange. Son s’il vous plaît sonnait en fait plutôt comme un maintenant. Mais les Ventrue ils sont comme ça. Ils sont très forts pour cacher leurs ordres bien réels et psychiquement oppressants derrière des formules de courtoisie.
Dunlaith ouvrit la porte. Et l’homme entra à l’intérieur, en enlevant son chapeau et en prenant la main de Dunlaith pour l’embrasser – il avait vécu à une époque où la galanterie imposait de ne pas serrer la main des femmes.

« Je me présente, je m’appelle Theodor Dietrich, et je représente la société de la Camarilla. Je sais que vous prétendez ne pas en faire partie, puisque la dernière fois qu’un ami de la Camarilla est venu auprès de vous afin d’obtenir de l’aide dans sa tâche – il souhaitait exiger de l’armement gratuitement il me semble – vous avez décidé de vider un magasin de fusil d’assaut dans son corps avant de lui demander de bien vouloir quitter votre domicile. Je dois avouer que mon précédent collègue n’était pas véritablement connu pour sa politesse et sa courtoisie, mais enfin, vous avouerez que c’était une réaction très légèrement exagérée.
Néanmoins, aujourd’hui, la situation est différente. Je viens ici pour obtenir des informations. »

Le petit homme fit comme s’il était chez lui. Il marcha un peu, et hésita à poser son chapeau et son imperméable quelque part : Il y avait dans la maison un certain foutoir et il n’avait pas envie de salir ses vêtements dont il chargeait ses goules de toujours garder très propres. Il grimaça d’ailleurs en voyant le chien qui aboyait et faisait le beau devant lui. Il ne supportait pas les poils de chiens.
Il alla devant la table où il posa son attaché-caisse, et s’assit tranquillement sur une chaise qu’il racla sur le sol. Il redressa ses petites lunettes de vue, posa le chapeau à côté, et se mit à sortir des papiers et des photographies qu’il posa.

« Avez-vous déjà vu cet homme ? Que pouvez-vous me dire de lui ? »

Il montra sur une photographie le vampire qui avait été assez peu précautionneux, l’amenant à mordre quelqu’un en public. La photo avait été prise de très loin, mais elle n’était pas floue, il avait dû s’agir d’un appareil photo de très bonne qualité. On le voyait vêtu d’une grande robe rouge, entouré d’hommes qui étaient en train de décharger des caisses d’un camion.

« Et… Avez-vous déjà vu ces personnes ? »

Il posa d’autres photographies, successivement. Parmi elles, Dunlaith pouvait reconnaître la fille que le vampire avait mordue et que Murphy avait suivi.

« Le vampire s’appelle Guiorgui Zourabichvili. C’est un Tzimisce et prêtre du Sabbat. Il a follement considéré qu’un bon moyen de monter les rangs de sa hiérarchie et de se rendre indispensable de sa secte était de créer une commotion à Cleveland, juste sous le nez des chasseurs. Peut-être savez-vous, étant donné que vous êtes âgée et loin d’être une Caitiff laissée dans l’ombre, que cette ville pullule de Traqueurs qui voudraient chercher notre mort, et également celle du Sabbat. Monsieur Zourabichvili souhaite peut-être les terrifier, ce qui sera difficile à accomplir, ou bien peut-être simplement les tenir occupés à Cleveland pour pouvoir augmenter leur main-mise sur Détroit. Vous voyez, allumer des contres-feux, créer des diversions…
Et lorsqu’il s’agit du Sabbat, vous imaginez bien en quoi ces diversions consistent. Nous sommes peut-être dans un contexte de peur du terrorisme et des règlements de compte, mais il y a raison ici de craindre beaucoup pour la Mascarade. Et pour quelle autre raison la Camarilla existe, que pour maintenir la Mascarade ? »

Theodor Dietrich fit un petit sourire avant de projeter son regard directement dans celui de Dunlaith. Il y avait quelque chose de pénétrant dans son regard, renforcé par ses yeux d’un bleu glaçant.

« J’ai été envoyé ici afin de régler cette situation avant qu’elle puisse devenir un problème. Votre coopération est souhaitable mademoiselle. Je vous demande toutes les informations que vous avez pu obtenir depuis que vous êtes entré en contact avec monsieur Zourabichivilli. »
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Sam 1 Déc - 0:51
« Et donc. Heu…
Tu fais quoi dans la vie ? »

On dirait un dîner gênant. Genre comme quand vous faites un coming-out dans une famille catho, ou que vous ramenez une fille noire à la maison. Assis sur la banquette arrière, je me retrouve très, très à l’étroit au milieu d’une voiture pleine de vampires.

« Je… Je suis diacre.
– Diacre ? T’es pas sérieux. Putain. »

Le conducteur ricane comme pas possible. Il bouge le rétro du conducteur pour pouvoir me regarder dans les yeux. Il ricane tellement que je vois parfaitement ses crocs.

« T’es un cul-bénit et tout ? J’ai fais mon catéchisme tu sais, frérot ! J’ai même couché avec une moniale une fois.
Mais hey, je te rassure. J’ai jamais tué de prêtres, même pendant la Commune. Faut dire que vous cherchiez, les curaillons.
– Hun-hun.
– Mais où tu vas chercher des types pareil Dunlaith ? C’est incroyable quand même.
J’espère que t’as ramené un truc pour tonton Bonnot malgré tout. »

Elle lui sort silencieusement un pistolet-mitrailleur MP5 avec un chargeur Bêta-Mag de 100 coups. Le truc qui prend 5 secondes à tirer et 15 minutes à charger. Il ricane et se le colle entre les genoux tout en continuant de ricaner.

« En plus Vinnie a pas pu s’empêcher de ramener son canon scié que tu lui as offert pour Noël. Faut pas que les flics nous arrêtent sinon on va trop se marrer !
– P-Peut-être que vous devriez ralentir alors… Je murmure tout doucement depuis ma banquette arrière.
– T’inquiète cousin ! J’conduis une automobile depuis qu’elles existent !
Bordel mais ça veut dire quoi ce panneau ? »

C’est un panneau pour céder la priorité. Cela ne gêne absolument pas Bonnot qui traverse sans freiner une intersection. Y a des klaxons et des gens qui pillent net, mais ça ne gêne absolument pas le conducteur qui est collé tout près de son pare-brise comme un vieux avec des problèmes de vision. Sur le siège passager, le deuxième homme qui ne parle presque pas (Je devine qu’il s’agit du-dit Vinnie du coup) regarde passivement les lumières de Cleveland qui dansent un peu depuis la vitre. Je crois qu’on est en train de rouler à 160km/h. En plein centre-ville.

« Murphy c’est un bon gamin, dit Vinnie tout vite avec un accent italien cliché de film si bien que je me demande s’il l’invente pas. Oh ouais ouais un bon gamin j’t’assure. Mais là on va se mesurer à quoi hein ? Faut qu’on fasse gaffe quand même ; j’dis pas qu’j’suis lâche j’suis toujours prêt pour la bagarre mais là voilà quoi faut qu’on s’mette d’accord y nous faut un plan d’action les gars ok ? Ok capiche, action réaction, ouais !
– C’est qu’un Ventrue. Les Ventrues c’est des pédés, y portent des beaux costards et ils ont une jolie voix mais il savent pas trop faire autre chose. Tu vas voir, ton Ventrue j’vais l’attraper par le col j’vais lui coller deux baffes, on va l’entendre faire prout. Il va faire caca.
– Oui. D’ailleurs. À propos de ça. »

C’est Dunlaith qui prend la parole. Elle prend la parole pour mieux préciser la situation. Elle explique qu’en fait il y a pas seulement un Ventrue, mais aussi un Tzimisce du Sabbat. Là, d’un coup, les deux hommes regardent derrière eux pour observer l’irlandaise avec des gros yeux et des sourcils obliques. Il y avait de la terreur absolue sur leurs faces de morts-vivants.
Ça ne me rassurait pas trop.

« Merde. T’aurais pu prévenir quand même Dun’.
– On va pas se mesurer à eux, c’est le Ventrue qui va s’en occuper, précise malgré tout l’irlandaise. Nous on doit juste tirer Murphy de là avant.
– Un Ventrue qui va charger un local du Sabbat tout seul ? C’est… ça doit être un sacré Ventrue celui-là.
– Ouais si ça-s’trouve là ton Murphy l’bon gamin il est d’jà en train d’se faire sucer l’sang et tout, j’veux pas être mortifère mais c’des choses qui arrivent t’sais, coupe Vinnie.
– Ouais, ou alors on l’a transformé en une espèce de monstre hideux et immonde qui veut bouffer des gens, répond Bonnot.
– Ou alors t’sais ils l’ont torturé et réduit en pièces.
– Ou bien ils l’ont écartelé.
– Ou défoncé à coup de barres de fer.
– Ou alors pour se marrer ils lui ont laissé une chance : Filé une arme et balancé dans un labyrinthe. Des fois ils font ça aussi !
– Vous parlez de mon neveu, les gars.
– Désolé Dun’ ! »

Je me fais progressivement de plus en plus petit. Ils discutent entre eux. Ricanent. Conjecturent. Parlent de ce qui les attendent. De leur envie d’en découvre. À un moment Dunlaith se fout d’eux en imitant une poule qui fait cot cot cot avec ses mains, ce qui fait que Vinnie bondit sur son siège en disant qu’il allait lui montrer comment c’était pas un lâche. Tout le monde semblait oublier que j’étais là, et c’était tant mieux d’ailleurs.
Parce qu’à force de rouler à 160 pour tracer à travers Cleveland en manquant d’écraser des livreurs Uber Eats et des gens qui promènent leur chien, il est arrivé devant le bâtiment désaffecté.

Il ralentit à une vitesse normale jusque devant la barrière de l’usine. Il y a des gens devant. Des gangsters armés, avec des bonnets et des vestes fluo. À l’intérieur, le parking normalement vide comme n’importe quel parking d’usine désaffectée accueille exceptionnellement quelques véhicules. Ça doit être des invités.
Qu’est-ce qui se trame à l’intérieur ?

Bonnot baisse la vitre et s’arrête devant les gens de l’entrée qui sont en train de tranquillement se passer un joint. Il leur fait coucou de la main avant de les siffler.

« Youhouh ! Messieurs ! Pardonnez-moi : Mes amis et moi-mêmes sont perdus. »

Les mecs lèvent leurs yeux en faisant genre ils comprennent pas. Mais Bonnot insiste. Il klaxonne. Immédiatement les hommes font des signes de mains et deux d’entre eux s’approchent du véhicule en levant leurs vestes pour montrer leurs flingues rangés dans leurs holsters.

« Hey ! T’es fou toi ? Casse-toi allez !
– J’aime les hommes Africains. Cela vous dit de venir avec moi jusqu’à mon hôtel.
– Mais t’es fou ! Bouffon ! T’es fou !
Casse-toi ! »

Bonnot fait un petit signe de main avant de redémarrer, pendant que les hommes crachent et crient. Je ne pense pas qu’ils soient des vampires du Sabbat. Probablement un gang d’humains tout ce qu’il y a de plus mortel qui ont été embrigadés là dedans. Le Sabbat aime bien faire ça quand ils ont besoin de trouver des flingues et des gros bras pour capturer des gens ou leur filer du fric bien humain qui leur servira à faire des opérations : Ils s’allient avec des petits gangsters locaux en se faisant passer pour des trafiquants d’un truc illégal quelconque. Généralement, quand ils ont fini, ils font passer aux gangsters le rituel de la pelle. Ils les transforment, puis les tabassent le crâne avec une pelle (Ou tout autre objet pouvant assommer quelqu’un), et les enterrent vivants. Quand ils se réveillent, ils sont assoiffés de sang et paniqués et doivent gratter à toute vitesse pour sortir et s’abreuver. S’ils s’en sortent pas, eh bien… Eh bien tant mieux, ils ont raté l’interview pour le job. Ça fournit un vivier de recrutement plutôt efficace, faut dire ce qui est.
Mais pour l’instant, c’est rien de plus que des mortels quelconques. Et Vinnie ne peut pas s’empêcher de rire après ce qui vient de se passer.

« T’es fou ! Matto da legare!. Qu’est-ce qui t’as pris de faire ça ?
– Je voulais vérifier s’ils étaient armés.
– Et maintenant qu’t’es sûr qu’ils l’sont ? »

Bonnot pille et ralenti soudainement. Il tourne le volant à fond afin que son véhicule fasse demi-tour. Le capot dirigé vers la barrière.
Il rit.

« Préparez vous les petits potes ! »

Il met le frein à main. Pied au plancher. Les pneus crissent sur l’asphalt.
Je remet bien ma ceinture de sécurité.
Bonnot retire soudainement le frein à main. Il fonce en passant en quelques secondes à peine de 0 à 100 en profitant de la route qui est dirigée juste vers la grille de l’abattoir. Les mecs en faction devant la porte paniquent. Certains courent et s’enfuient en hurlant. Deux ont la présence d’esprit de sortir leurs armes et de se mettre à rafaler le véhicule.
Je baisse la tête tandis que je ressens tout le choc du véhicule qui explose la barrière. Il fonce à travers le parking, puis ralenti subitement ce qui fait jeter du gravier sous les pneus partout.
Trois portières s’ouvrent. J’entends le « ding, ding, ding, ding, ding » du warning de la voiture qui est pas contente du fait que des gens s’enfuient en laissant les portes ouvertes.

J’entends plein de tirs. Des hurlements. Des cris. Moi contrairement à mes trois « camarades » morts mais bougeant encore, j’ai encaissé tout le choc et je dois sortir du coaltar. Je retire ma ceinture de sécurité, ouvre la portière, et sort dehors en tenue de pompier renforcée par un plastron pare-balle, carabine M4 en main. Je prends une jolie pose militaire tandis que je rush à l’extérieur pour analyser la situation.
Je baisse vite mon arme et reste bouche bée en observant le spectacle. 3 vampires déchaînés qui se jettent sur des gangsters. Vous imaginez bien ce que ça peut donner.
Bonnot va super vite. Certains vampires ont ce talent, c’est un des plus chiants. Le seul moyen de les buter c’est d’utiliser des mines et de compter sur leur idiotie. Il va tellement vite que je peux à peine suivre ses mouvements. Et il utilise n’importe comment son MP5 en mitraillant les gangsters qui sortent de leurs bagnoles et du bâtiment qu’ils sont censés garder.
Vinnie se contente de charger l’un d’eux comme un fou furieux et de lui faire une prise de rugby. Il lui plante ses crocs dans la gorge, et le pauvre bougre se met à hurler comme un dément. C’est étrange, d’habitude on hurle pas de douleur en se faisant mordre. Un gangster fonce avec un pitbull pour tenter de sauver son collègue mordu, mais en plein milieu de la course, le pitbull se retourne, grogne après son maître, et saute sur son visage pour lui déchirer la mâchoire.

Je me relève lentement, en respirant très fort, des acouphènes dans les oreilles, la vue un peu troublée. J’assiste à un massacre monstrueux de 8 ou 9 mortels qui ne font pas du tout long feu face aux armes, aux poings, et aux capacités surnaturelles des vampires.
Le pire vous savez c’est quoi ?
Ces trois monstres issus de Satan… C’est les gentils. Je suis vraiment pas pressé d’entrer à l’intérieur.

Malheureusement Dieu n’entend jamais mes prières. Dans le grand bâtiment désaffecté retentissent des détonations. Quelques tirs au départ, puis tout un canardage d’artillerie. C’est pas des tirs dirigés vers nous, c’est des tirs qui viennent de l’intérieur, des échanges de coup de feu très violent : On est en train de s’entre-tuer là-dedans.
Une grosse porte coulissante en métal s’ouvre depuis le bâtiment. En sors une tête-de-pelle (Surnom affectueux donné aux vampires nouvellement créées et fous furieux du Sabbat). Il tire dans ma direction. Je m’accroupis soudainement derrière la voiture de Bonnot qui est trouée de balles, puis me relève à nouveau pour tirer à la M4. Les munitions incendiaires de Dunlaith font merveille. La tête-de-pelle hurle de douleur et se replie immédiatement à l’intérieur en me fixant avec un tir léger.
Dès qu’il est rentré, d’autres choses sortent. Je dis bien choses parce que je baisse le réticule de ma carabine pour bien m’assurer, avec mes yeux nus, que je ne suis pas en train de rêver à cause d’un choc un peu trop violent suite à l’enfoncement de la barrière. Mais si, je suis bien en train de voir ce que je suis en train de voir.
C’est pas la première fois que j’affronte un Tzimisce. Ce qui m’étonne c’est pas qu’ils soient capable de créer des monstres grotesques et immonde, ce qui m’étonne, c’est l’imagination dont ils font preuve à chaque fois. Là, le monstre en question, c’est une sorte de quadrupède laid et minuscule avec trois grosses têtes toutes plus immondes l’une que l’autre, et chacune une bouche qui a une centaine de crocs dégoulinants de sang. Trois ou quatre de ces immondes bestioles sortent en poussant un hurlement strident de strie. Je décide vite de les canarder méthodiquement avant qu’elles n’arrivent jusqu’à la bagnole.

« Mais bordel ! Butez ces trucs ! »
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Dim 9 Déc - 14:51
Mon simple ordre de butez ces trucs eut une réponse disproportionnée. Je me rendais compte à quel point je n’étais pas du tout un acteur de ces événements. J’étais un spectateur.

Derrière Dunlaith, Vinnie et Bonnot s’élancèrent en avant. Bonnot beaucoup plus vite que Vinnie d’ailleurs : Ayant terminé de sucer un pauvre gangster jusqu’à ce qu’il n’ait plus une seule goutte de sang, probablement pour se mettre en forme et lui permettre de continuer à utiliser ses pouvoirs inhumains, il se jeta en avant à toute vitesse avec son MP5 rechargé. Il massacra les goules horribles et de formes différentes, toutes plus horribles et terrifiantes les unes des autres, pour les massacrer à bout portant au 9 millimètre tout en évitant soigneusement leurs coups de leurs pattes. Vinnie, pendant ce temps, restait à l’écart. Il allait de cadavre en cadavre, et je l’observais, hagard, et légèrement dégoûté, tandis qu’il exerçait une sorte de… De rituel un peu étrange. Il s’agenouillait devant chacun des corps, leur ouvrit la bouche, et soufflait dedans de telle façon que j’avais l’impression qu’il était un nécrophile qui avait envie de faire des french kiss à des décédés tout récents dont la chair était criblée de balles.

Puis, soudain, le tout premier des corps à qui il avait roulé un patin se mit à avoir un spasme. Je sentais un tremblement froid gagner mon échine.

« Bordel de merde. »

Mes conceptions de la vie et de la mort, de l’âme et du corps, ce christianisme tout droit et simpliste, ça avait déjà été érodé depuis longtemps par l’existence des vampires. Mais ça c’était nouveau. Vinnie venait de fabriquer des… Des zombies. Il y avait pas d’autres mots. Comment vous appelez autrement ce cadavre qui se soulève, couvert de balles, et qui s’élance en titubant et sans dire un mot jusqu’à l’intérieur du bâtiment ? Je m’éloignais et les laissait paisiblement s’élancer, comme une masse de gens bourrés à la bière qui voulaient aller aux toilettes, tandis que les deux vampires allaient l’un vers l’autre pour se faire un check.

« C’était du beau boulot ! On fait une bonne équipe !
Si, si, amico moi... Mais c’était facile là, ce ne sont que des mortels, pas les fantaccina du Sabbato.
– Héhé, oui oui, allons à l’intérieur. On va se séparer pour trouver Murphy au plus vite, Dunlaith saura s’en sortir toute seule ! »

Vinnie jeta un regard vers moi. Il leva un sourcil dédaigneux puis tourna les talons sans dire un mot. Je suis un spectateur, je déconne pas. Les deux hommes attendirent que tous les zombies entrent à l’intérieur, puis se collèrent aux portes de l’usine, vérifièrent les munitions dans leurs armes, puis entèrent là-dedans.
Il y avait un tas de tir. Il y en avait ininterrompus depuis un moment. Des détonations, des cris étouffés, des flashs lumineux qui venaient des vitres. L’entrée de Vinnie et de Bonnot ne fit pas changer le nombre et la fréquence des détonations : Il y avait un massacre là-dedans, et aucun de mes trois potes vampires n’y étaient pour quelque chose. Je prenais une grande inspiration, tirait mon crucifix que j’avais accroché sous mon gilet pare-balle mais au-dessus de ma tenue de pompier, et je l’embrassais à pleines lèvres avant de mettre sur mon visage un demi-masque de protection contre les vapeurs, et de m’élancer à l’intérieur.

Une fois devant la porte, je pose ma carabine M4 et sort à la place mon fidèle Remington qui était accroché à mon dos. J’allume la petite lampe torche sous le canon et colle la crosse à mon épaule. J’entre à l’intérieur. J’ai chargé que des balles Haleine de Dragon, aussi je suis content que la tenue que m’a filée Dunlaith soit ignifugée. Néanmoins, je vais essayer de retenir mes tirs. Bonnot et Vinnie sont des vampires, ils seraient capables de se mettre à paniquer et à s’enfuir comme des chats qu’on jette dans un bain d’eau si je commence à créer une fournaise dans un milieu clos.

L’intérieur du bâtiment est extrêmement sombre. C’est la lueur de mon fusil à pompe qui me permet de m’éclairer et d’entrer à l’intérieur. Il n’y a même pas de petites lumières minuscules pour indiquer la voie à une issue de secours : Si ce n’est pas le manque d’électricité, ce doit être le fait que le bâtiment ait fait faillite avant qu’on invente les issues de secours. Cela ne gêne absolument pas mes deux collègues vampires qui avancent lentement avec leurs armes en avant. L’odeur immonde de cordite et l’atmosphère envahie de poudre de balles non plus. Vinnie défonce une porte d’entrée au pied-de-biche, et les zombies se ruent (Ou plutôt, avancent très lentement) à l’intérieur. On entend des voix paniquées en écho toutes proches.

« Vite ! Vite ! Allé wesh on s’casse aux bagnoles ! Faut qu’on s’tire ! »

J’étais ma lampe-torche. Immédiatement après on voit des lueurs. Des gens approchent. Des gangsters qui s’éclairent avec leurs smartphones. Ils s’engueulent entre eux. Ils débouchent dans le couloir. Le premier met son smartphone nez-à-nez face à l’un des zombies.

« WOH PUTAIN C’EST QUOI CA !
JAIMIE ?! »

Le monstre, qui devait ressembler à l’un de ses potes avant d’être criblé de balles puis embrassé langoureusement pour retrouver sa mobilité, se saisit violemment de son col et se jette sur sa machoire qu’il commence à bouffer. Les autres types derrière lèvent leurs flingues et se mettent à tirer dans tous les sens. Je me jette par terre. Vinnie et Bonnot se collent aux murs. Les balles fusent dans tous les sens jusqu’à me rendre quasi sourd. Un déluge de balles qui traversent la chair de leurs anciens amis qui poussent des hurlements stridents et immondes. Les balles traversent aussi, dans une moindre mesure, Vinnie et Bonnot, mais surtout les zombies en plein milieu qui s’avancent.
Quand enfin ils cessent de tirer, probablement à court de munition, il ne reste que deux zombies qui marchent encore en avant. Alors, Vinnie et Bonnot hurlent et sprintent tout droit pendant qu’on entend des cliquetis mécaniques de munitions. Je rallume ma lampe-torche et me relève pour pouvoir assister à une scène ahurissante de massacre.
Bonnot est en train de sucer le sang d’un pauvre type écrasé contre le mur. Vinnie a prit une hache en cas d’incendie qui traînait et l’utilise pour donner des grands coups dans tous les sens qui éclaboussent les murs de sang. L’un des zombies se jette sur un gangster à terre et commence à le bouffer. Je m’avancent lentement en illuminant le sol pour découvrir tout le sang et les douilles de pistolets-mitrailleurs qui jonchent le sol. Je fais attention de ne pas glisser tandis que nous continuons à l’intérieur.
On traverse un couloir et on en fait le tour. Lentement, on ouvre porte après porte. On s’apprête à en franchir une troisième, mais quand Vinnie pousse la poignée, il voit qu’elle est verrouillée. Il se tourne vers nous et crie avec son accent italien.

« Je vais la défoncer. Tenez-vous prêts ! »

Bonnot ricane. Il se tourne vers moi et je peux voir ses yeux illuminés par la lumière que je projette dans le couloir.

« Tu nous suis de près, mon ami ?
– Je préfère être derrière vous que devant.
– Héhéhéhéhéhéhé. La dernière fois que je me suis amusé autant, c’était en Angola.
Tu sais ce que c’est le point commun entre les mercenaires et les gangsters ?
On sent jamais de regrets quand on les butes. »

Il me donne une petite tape contre l’épaule puis prend son MP5 et vise la porte. Vinnie retourne sa hache, pour afficher un morceau métallique qu’on appelle une « barre Halligan », qu’il enfonce dans la fente. C’est pas aussi rapide que juste défoncer la porte. Il la démonte méthodiquement, dans un long fracas métallique. Et alors qu’il commence tout juste à la déverrouiller, une pluie de détonations retentissent de l’autre côté. La porte est déchirée par un tas de balles, en même temps que Vinnie qui est troué comme un gruyère. Vinnie se recule rapidement et se colle au mur en gémissant.

« Hé ! Ça va copain ?! »

Vinnie a l’air de souffrir. Trois secondes. Puis son visage se détend et reprend un air normal. Il observe son corps qui est dégoulinant de sang.

« Ah putain, non !
Un costume tout neuf ! »

Bonnot rit jaune. Puis il met son MP5 en joue. Vinnie relève son outil Harrigan, attend que les tirs sporadiques qui perforent la porte cessent, puis il hurle une insulte en italien et donne un coup sec droit dans la porte qui fini de l’ouvrir. Immédiatement dans le trou ainsi opéré Bonnot s’élance à toute vitesse en rafalant. Vinnie le suit de près en criant et en levant la hache en l’air. Je les suis de près tandis que la pièce est illuminée par des flashs multiples et des tirs. Je regarde à l’intérieur, ma lampe-torche éclairant la pièce.

Ce ne sont pas des gangsters que mes collègues affrontent, mais des vampires. Des têtes-de-pioches folles à lier. D’habitude les vampires sont très dur à reconnaître des humains, mais là c’est pas pareil. Y a dans la pièce trois fous furieux couverts de terre et moches comme tout, mais à la peau noire et avec un accoutrement similaire avec les membres du gang à travers lesquels on se taille un chemin depuis tout à l’heure, donc je pense que ce sont des têtes-de-pioches nouvellement créées. Leur toute nouvelle condition démoniaque n’enlève rien à leur fureur cependant. Les balles de 9 millimètre avec lesquelles Bonnot les cribles ne semble pas avoir trop d’incidence sur eux, même s’ils se mettent sommairement à couvert et tirent avec peu de précision, leurs pistolets tenus de façon légèrement oblique, derrière des montes-charges et des rouleaux.
Je me rend enfin compte de quel genre d’usine on est : On est dans un abattoir. Les couloirs ne me disaient pas grand-chose malgré la présence de carrelage et des murs blancs, mais là la disposition de la pièce ne peut pas me tromper. D’ailleurs Vinnie fonce au milieu de la pièce en plein dans le crossfire entre Bonnot et les trois têtes-de-pioches, saute sur un croc de boucher, s’élance à travers la pièce et passe derrière la couverture des agents du Sabbat pour en massacrer un à la pioche. Les deux autres se lèvent immédiatement pour le tuer. C’est là que je décide enfin de me rendre utile.

« Bonnot ! Tête au sol ! »

Bonnot ne discute pas mon ordre. Ça doit être un réflexe instinctif plus qu’un signe d’obéissance ou une confiance en moi. Il se jette à terre tandis que je me met en joue et que je tire en succession trois coups en pompant mon fusil à chaque fois. Trois gerbes enflammées de magnésium à plus de 3000°F. La tête-de-pioche que j’aie enflammée hurle à la mort en bougeant dans tous les sens, tandis que son collègue s’enfuit en criant dans une autre pièce.
Bonnot se relève en se couvrant la tête. Il m’invective à voix haute, une voix qui, il me semble, marque un peu de peur.

« Espèce de taré ! Tire pas des trucs comme ça ! Merde ! Fait chier ! Enculé ! »

J’ai un peu envie de rire. Je me retiens très fort en me mordant les lèvres mais oui, j’ai envie de rire. Je retrouve un peu de contrôle sur ces monstres. Ils ont peut-être la capacité de massacrer une douzaine de mafieux sur leur chemin, mais ils sont terrifiés à la vue de quelques flammèches.
Pendant que le vampire crame comme une torche humaine, courant dans tous les sens et laissant derrière lui des petites flammes, je charge vers Vinnie, qui est en train de défoncer un des vampires à la hache. Mais celui-ci reçoit plutôt bien les dégâts, donne un coup de griffe très puissant dans la jambe de son ennemi et le balance à l’autre bout de la pièce. Les deux hommes se vouent une lutte très puissante et acharnée, ça serait très intéressant à voir de la MMA de vampires. J’épaule mon fusil et sitôt que Vinnie est à terre je tire une autre cartouche pour blesser très grièvement son ennemi. J’entends Bonnot hurler comme un fou, avec une voix beaucoup plus forte et débordante d’anxiété.

« QU’EST-CE QUE JE VIENS DE TE DIIIIRE ?! »

Je me retourne pour voir Bonnot. J’ai même pas besoin de l’éclairer avec la torche de mon arme, juste les flammes qui commencent à envahir la pièce suffisent. Il a des yeux déments. Il se protège les cheveux avec sa main. Je suis persuadé que si le feu envahi cette pièce il serait capable de me buter, juste pris d’un accès de rage. Je décide donc de vite partir d’ici, fuir comme si c’était un pitbull qui devenait fou. La tenue de pompier me permet de traverser aisément la pièce tout seul et de suivre la troisième tête-de-pioche qui s’est enfui.

Je remonte vite le couloir et me retrouve devant une grande porte ouverte. Elle mène à une pièce que j’estime très très grande, peut-être la majorité du complexe. Je regarde derrière-moi, fait une halte de deux secondes, puis je décide de ne pas attendre Bonnot et Vinnie. J’entre seul à l’intérieur.
C’est effectivement une pièce géante. C’est l’entrée où à une époque on devait amener des bovins par camion. Il y a une sorte de mini-couloir en labyrinthe qui s’étend sur des mètres et des mètres, avec des grilles séparées pour faire passer les bêtes une à une jusqu’à des petits box où on les tues avant de les accrocher. Le Sabbat a parfaitement mit à disposition les locaux. L’endroit est beaucoup plus visible qu’ailleurs parce qu’il y a des cierges et des bougies allumées partout.

Je recule soudainement et j’ai un haut-le-cœur que je réprime violemment afin de ne pas vomir à l’intérieur de mon casque. Il faut tout cramer. Il faut tout faire cramer.

Il y a une marre de sang géante. Il y a des gens nus accrochés à des crocs de boucher. Des êtres humains pendus par les pieds et complètement blancs, livides, exsangues, souvent avec des lacérations profondes dans la gorge ou sous les aisselles. Toutes ces personnes sont placées à tour de rôle au-dessus d’une bassine qui est remplie pas encore totalement de sang, il y en a encore une pas encore tout à fait blanche mais définitivement décédée qui est accrochée : J’ai déjà vu des choses similaires, le Sabbat fait des bains rituels dans le sang. Où est-ce qu’ils ont trouvé tous ces mortels ? L’ordinaire. Des SDF, des junkies, des migrants mexicains, des jeunes gens de pays du Tiers-Monde qu’on a fait venir jusqu’ici par bateau des gens qu’on ne cherche pas et qui peuvent disparaître sans que la société en soit chamboulée. Parfois ils prennent des risques, ils capturent des femmes blanches citoyennes des États-Unis, mais après quelques semaines de tapage médiatique et d’Alertes Enlèvement ça se calme et on oublie vite. Le plus terrifiant c’est pas la vision de ça.
Le plus terrifiant c’est que ça ait eu lieu à deux bornes de Cleveland. Chez nous. Sur notre territoire. Je compte 12 cadavres accrochés. C’est déjà 12 cadavres de trop. Quand je vais prévenir mon supérieur, le père Scott Willard, je peux vous garantir que la Légion va faire une descente magistrale dans les bas-fonds de la ville jusqu’à ce qu’on retrouve jusqu’au dernier complice du Sabbat qui a osé fouler Cleveland de ses pieds.

À condition que je sorte d’ici en vie.

Vinnie et Bonnot me retrouve en sprintant vers moi, tandis que j’avance lentement dans la pièce. Bonnot me pointe du doigt et hurle. Il s’avance vers moi, je crois qu’il veut me prendre par le cou.

« Espèce d’enfoiré ! Je vais t’apprendre !
Che schifo... Regarde moi ça Bonnot. »

Bonnot se désintéresse soudainement de moi. Il regarde autour de lui. Il renifle. Il ferme les yeux à mi-clos et tend les muscles de sa face. Je crois que l’odeur du sang le détend. Il soupire.

« Aaah… Ils savent comment vivre ces enfoirés du Sabbat.
Heu… J’espère que Murphy est pas parmi eux ? »

On fait le tour dans la grande pièce. On a pas le temps de passer beaucoup de temps. Alors que je m’approche de la bassine pour où les vampires allaient faire un de leurs rituels barbares et satanique, on entend de lourds bruits de pas retentissant sur une grille métallique au-dessus de nous. Je lève mon fusil à pompe et projette de la lumière sur une passerelle qui surplombe la pièce. Une… Créature, se trouve là. Un humanoïde, grand, bien habillé avec une longue robe de velours rouge et de soie, mais au crâne complètement déformé. Il a quatre yeux et sa tête ressemble à un ananas géant couvert de cartilage. Pour autant, il ne s’agit pas d’une goule sans cervelle bonne qu’à tuer bêtement. La chose nous regarde, avec un sourire sardonique dessiné sur des lèvres gercées qui ressemblent à des écailles.
C’est un Tzimisce. Il rit. Et il se met à psalmodier, avec une petite voix terriblement grave.

« Ah… Voilà donc les fantassins de la Camarilla. Il semblerait que retourner mes novices contre moi avec vos talents sordides de Ventrue ne vous a pas suffit. Il faut que vous veniez ici mettre destruction à ma chapelle avec toute mesure d’armes et de lames. Savez-vous à quel point vous êtes insignifiants ? Quand les petits-fils de Caïn reviendrons dévorer le monde, vous ne serez rien d’autre qu’une tâche de sang sur leurs capes…
– Mais qu’est-ce que… Chuchote Vinnie.
– Heu, m’sieur, se contente de répondre Bonnot avec un rire canaille. Désolé de vous déranger mais nous on est pas des putains de la Camarilla. On vient juste récupérer quelqu’un et se barrer, hein.
– Vous ne sortirez pas d’ici vivants… Croyez-vous être les premiers à vous tenir sur mon chemin ? Depuis les décennies de ma nouvelle existence, j’ai renforcé mon corps et mon âme par l’Amaranth… La seule tentative de survie qu’il vous reste est encore de fuir mon sanctuaire.
Non dire quattro se non l'hai nel sacco, Sabbat !
– Comme vous voudrez. »

Le Tzimisce enjambe la barrière. Il saute en contre-bas, une chute suffisante pour faire voler sa robe, mais elle ne lui fait aucun dégât. Il s’approche de la bassine qui est pleine de sang, la soulève, et la renverse, laissant glisser une mare d’hémoglobine qui se met à couler dans toutes les interstices des dalles de la pièce, partout. Bonnot ricane. Et, dans un mouvement ultra-rapide, plus vite que son ombre, dégaine un revolver avec lequel il crible de balles de Tzimisce. Il touche le vampire qui s’enfuit dans un bond pour éviter les balles suivantes.

« Vinnie ! Ta hache ! »

Vinnie jette sa hache en l’air. Avec sa vitesse extrêmement rapide, Bonnot parvient à la saisir en l’air et fonce en avant pour rattraper l’ennemi. Moi je met le genou à terre. Je ne peux pas utiliser mon arme à flammèches sous peine de faire paniquer mes deux collègues vampires, et je n’ai pas envie qu’ils entrent en frénésie et se mettent à me bouffer. Je sors donc une longue lame qui est entre l’épée et le couteau, ainsi qu’une fusée éclairante. Je ne lève pas ma tête, mais je sais que Vinnie a sorti son arme à lui, un pistolet tout ce qu’il y a de plus basique, et qu’il tire de telle façon que la pièce très sombre est parfois illuminée par des flashs très rapides. Je survivrai pas deux secondes en restant dans l’obscurité. Alors j’allume le petit bâton, et jette la fusée éclairante au loin, ainsi qu’une deuxième. En me relevant, je peux maintenant clairement voir trois ombres en train de se battre.

Et Vinnie et Bonnot sont en train de plutôt bien gérer.

Le Tzimisce est extrêmement rapide. Malgré la vitesse surnaturelle de Bonnot, il esquive, bouge dans tous les sens, sautille de gauche à droite. Il a la peau déchirée par des coups de haches mais il parvient au final à plutôt bien encaisser. Le français est déchaîné et crie. À un moment, le Tzimisce parvient finalement à arrêter la hache par la hampe, à planter ses griffes dans Bonnot, et à l’envoyer à l’autre bout de la pièce en le soulevant. Immédiatement, Vinnie le crible de balles. Cela enrage le Tzimisce, qui se roule à terre et saute de couverture en couverture, passant derrière une grille, derrière un tapis roulant, derrière un chariot avant de finalement arriver à hauteur de l’italien et de se mettre à le désarmer et à lui donner un énorme coup de boule. Je me prépare à foncer dans la mêlée, quand j’entends juste derrière moi un bruit de tôle qui s’arrache.
C’est les racaillous démoniaques qui sont de retour. D’autres créations dégénérées que le Tzimisce a dû s’amuser à faire à partir d’animaux de compagnies, d’ânes et de vaches volées dans des champs, et peut-être même d’une ou deux jeune femme battue ayant fuit dans un foyer d’hébergement d’urgence. Je peste en criant, et dégaine mon pistolet en .45 pour tenter de les cribler de balles. Ils laissent plein de sang derrière eux et semblent handicapés par les projectiles qui déchirent leurs articulations et les os qu’on a replacé et reconstitué, mais ces monstres semblent incapables de sentir la douleur, ou en tout cas pas assez pour les faire reculer. C’est une chance que je garde mon gros couteau dans ma main gauche, parce que l’un des monstres se jette sur moi avec ses pattes qui ne sont ni des mains ni des jambes, et qui ont des ongles géants et tranchants comme des rasoirs. La tenue de pompier que Dunlaith m’a filé me sauve la vie : Les griffes ripent contre la tenue et sans ma protection je crois que j’aurais été lacéré profondément. Je parviens à dégager ma main malgré le poids de la bête et la terreur horrible qui me saisit en voyant 130 « dents » s’approcher à 5 centimètres de mon visage, et je lui enfonce mon couteau en plein dans sa « bouche », par plein de coups. Je retire mon bras juste avant que ses dents se ferment, je sauve mon bras grâce à une réaction à la seconde près. Coup de pied géant dans sa gueule, couteau enfoncé dans son œil, un deuxième des monstres me saute dessus et me fait rouler à terre. Il faut là aussi que je donne des coups de poings et de pieds en criant pour réussir à la faire tomber et me retrouver dessus. J’attrape mon fusil à pompe que j’avais posé à côté, lui file un gros coup de crosse, et me relève pour lui tirer entre les deux yeux. Les flammèches géantes du Dragon Breath l’enflamme directement. Je reprends mon couteau, je reprends mon pistolet que je recharge, et je me prépare à subir une autre vague de monstres, essayant de gagner du temps pour que Bonnot et Vinnie s’occupent du Tzimisce.

Je me retourne d’ailleurs pour voir comment ils s’en sortent. Ils saignent beaucoup, ils semblent affaiblis, mais les deux ont réussi à faire tomber Guiorgui Zourabichvili. Il se dégage et se relève lentement, en riant.

« Pas mal… Pas mal, pas mal du tout. »

Il prend une grande inspiration. Puis se retourne pour faire face à Bonnot qui relève bien haut sa hache et Vinnie qui recharge son pistolet en mettant un nouveau magasin.
Je vois, assez difficilement, mais je vois quand même grâce aux fusées éclairantes, que le Tzimisce a changé. Il est plus grand, je crois. Plus grotesque aussi. Il a un bras droit géant, sa robe est en train de se déchirer. L’horreur s’empare de moi, tandis que je me rends compte de ce qui est en train de se produire.

Le Tzimisce est en train de se transformer.

« L’épée de Caïn ramènera le monde dans l’état de la Cité d’Enoch ! Agenouillez-vous ! »

Son deuxième bras grossit aussi. C’est une transformation lente, que je n’aie jamais vue de mes propres yeux, mais que j’ai déjà lu dans des textes. Il risque de devenir si grand et si puissant que même deux vampires qui ne sont pas nés de la dernière pluie seront juste pulvérisés par une simple griffure. Je recharge très vite, mes doigts un tout petit peu tremblants.
Une détonation retentit du haut de la palissade. Une balle vient de traverser le crâne du Tzimisce, ce qui semble l’énerver plus que le blesser. Je lève mon fusil pour éclairer de ma lampe torche le tireur. Je ne le reconnais pas à sa tenue ou à son apparence, mais je reconnais distinctement sa voix : C’est l’agent de la Camarilla qui est venu chez Dunlaith. Un petit homme avec des lunettes et un beau costume qui est couvert de sang. Et il porte dans sa main droite un pistolet Luger. Il semble passablement ennuyé, à en croire son petit sourcil relevé et sa petite grimace avec ses lèvres, par le fait que le Tzimisce soit aussi résistant aux balles. Et avec un très très léger accent allemand, et une voix paniquée qu’il tente pourtant de maîtriser, il s’adresse à nous trois.

« Messieurs ! Si vous pouviez avoir, je vous prie, l’amabilité de bien vouloir euthanasier Herr Zourabichvili avant sa transformation finale dans l’état de zulo, ce me semble que nous pourrions tous voir notre tranquillité apaisée ! »

Quand je vous dis que j’étais spectateur, je déconnais pas. Mais c’est pire encore. Je suis un spectateur qui a pas payé son billet. Y a trop de protagonistes d’un coup. Je me retourne, les yeux exorbités, et ignore le combat épique derrière moi pour me concentrer sur la prochaine vague de goules monstrueuses qui vont passer la porte.
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